Fin de service. C’est terminé, Lenne, il peut enfin souffler et rentrer chez lui. Même s’il y a encore un bout de trajet avant de vraiment pouvoir souffler. Il doit d’abord descendre tout en bas, traverser toute la Ville pour enfin trouver une sorte de confort primaire… Dit comme ça, ça semble presque être toute une expédition, en réalité, ça va, c’est que le chemin, il commence à avoir l’habitude de le faire. En fait, le plus délicat dans le lot, ça reste qu’il a juste cruellement envie de pouvoir se poser, juste cinq minutes dans n’importe quel endroit des Bains. Juste toucher cinq minutes à un luxe qu’il ne peut - pourra sans doute jamais, d’ailleurs - se permettre.
Mais bon, Lenne, il ne va pas ronchonner là-dessus pendant longtemps, il sait qu’il ne peut pas, eh ben, c’est pas grave. C’est même d’ailleurs la mine plutôt contente qu’il s’approche de la sortie des Bains, par la porte arrière. Il jette un coup d'œil à la coupure qu’il a sur sa main gauche… Elle n’a pas changé par rapport à la veille. Bon, en même temps, c’est pas deux jours après qu’il va aller mieux, hein. Un soupire, pas grave, il refait glisser sa main dans sa manche - histoire de cacher sa plaie, évidemment - et va pour sortir, retrouver cette bonne vieille place de l'arrière des Bains.
☽ Tiens, elle dit.
Et elle glisse dans ta main un liquide ambré, assez épais. Tu n'as jamais vu quelque chose de semblable.
Tu la connais, un peu, de visage et surtout de réputation. Tu connais l'histoire, une pauvre prêtresse d'un village lointain dont tout le village s'est sacrifié pour s'assurer de sa survie, de son arrivée jusque là. Tu l'imaginais plus noble et plus grande.
Sans qu’il puisse le voir arriver, elle vient lui donner un… truc. Comment décrire ce truc, d’ailleurs ? Ça a déjà une assez jolie couleur, mais ça semble aussi très bizarre. Le regard de Lenne fait un aller retour entre le bidule ambré qui se trouve dans sa main et le regard de celle qu’il a face à lui.
Parce qu’ici, on a rien sans rien. Tout n’est qu’échange. Elle ne lui a certainement pas refourgué ce drôle de liquide sans rien attendre de lui en retour… Et auquel cas elle ne veut rien en échange, c’est ce que truc est certainement compromettant.
☽ Applique ça dessus.
Elle désigne la fiole dans ton autre main et repose ses yeux dans les tiens. L'espace d'un instant, tu es intimement persuadé qu'elle ne te veut pas du mal, mais bon, aux Bains, à quoi s'attendre ?
Alors, par contre, quand elle lui demande - exige ? - d’appliquer le drôle de liquide épais ambré qu’elle lui a mit dans la main tout à l’heure sur sa plaie, il… Ben, c’est qu’il est étonné plus qu’autre chose, Lenne. Il décide de choisir de lui faire confiance - a t’il vraiment le choix ?
☽ Ici ... ?
Elle murmure, remuant à peine les lèvres. Elle a des airs d'un enfant pris sur le fait d'avoir fait une grosse ânerie mais sur le coup ça ne te choque pas plus que ça. Elle regarde derrière ton épaule, mais personne ne vient, alors, elle tire sur ton poignet pour t'entraîner plus loin dans les Premiers Pas, plus loin de l'accès vers les Bains.
Tu remarques alors, à peine quelques instants après avoir appliqué le liquide, que la plaie a déjà significativement diminué.
Sans perdre plus de temps, elle l’entraîne ailleurs. Quelque part dans les Premiers Pas. Il se laisse faire, mais tout est de plus en plus étrange. Et, quand ils finissent pas se stopper, il l’observe d’un air interrogatif, savoir si, c’est bon, ici, il peut. Honnêtement, il ne voit aucune différence entre ici et l’endroit où ils étaient tout à l’heure.
Et aussitôt ceci fait… Eh ben, disons que l’unique réaction qu’il a envie de faire c’est celle de hurler. Il se retient en se mordant un peu trop fort la lèvre, mais, par toutes les Nosférantes existantes sous terre, qu’est-ce-que c’est que ça ? Il ne voit pas le côté positif de la chose, Lenne, le seul truc qu’il voit c’est que c’est tout simplement impossible ?
☽ Je t'ai aidé.
Tu ne sais pas pourquoi elle fait ça, pourquoi elle te le dit, mais tu es bien forcé de la croire. Cependant, elle n'a pas l'air déterminée à te demander quelque chose en retour. Elle observe ta main fermée.
☽ Garde... Le reste. Si quelqu'un est blessé, fais lui boire.
Tu n'es pas complétement idiot, tu sens qu'elle a du mal à choisir ses mots, sans doute parce qu'elle est encore novice dans ta langue, mais elle prend bien soin de choisir les bons. Tout de même, ça ne lui semble pas assez clair, alors elle ajoute :
☽ Ça guérit.
Tu avais deviné.
Ses idées reviennent un peu au clair quand elle donne des explications. Très rapides, mais, il n’a pas besoin de plus, Lenne. Il regarde la fiole. Est-ce qu’il serait vraiment capable, un jour, de donner ça à quelqu’un ? Pourquoi est-ce qu’elle ne le reprend pas, d’ailleurs ? Trop de questions, aucune réponse. Il se contente de hocher la tête, Lenne, et de mettre la fiole dans l’une de ses poches, à l’abri des regards. Avant de reposer son regard sur elle, l’air interrogatif. Pas spécialement serein, mais au moins, il arrive à articuler quelques mots.
Parce que qu’il suffit juste de lancer un coup d'œil en ville pour en croiser plein, des gens dans un pire état que lui. Parce qu’il y a sans doute d’autres qui sont bien plus nécessiteux que lui. Il est abasourdi, Lenne, au point de ne même pas penser à la remercier, au point que même l’idée de la remercier ne lui a pas traversée l’esprit.
☽ C'était mon rôle, avant. Soigner les gens.
Tu te doutes qu'ici personne n'accepterait de boire une mixture bizarre, bon, à part aux Bains où toutes sortes de drogues tournent, mais est-ce qu'elle a vraiment envie d'aider les Élevés ? Alors que tu la regardes, tu n'es plus sûr de rien.
Enfin, elle repose son regard sur toi pour te sourire, brièvement, elle a l'air gênée. Elle pose son index contre ton torse.
☽ Tu descends en ville, tu pourras aider des gens si je te fournis de quoi faire ?
Ha, bien sûr. Tu comprends que sa place au sein des Bains est un sacré frein, finalement. Elle baisse les yeux.
☽ Je ne sais pas à qui demander, ce sont tous des traitres.
Et quand elle vient poser son doigt contre lui, c’est un léger mouvement de recul qu’il fait, Lenne. Plus un réflexe qu’autre chose, mais il écoute quand même sa proposition. Qui lui semble être bien étrange. Enfin, d’un côté, ça fait sens avec ce qu’elle lui a dit juste avant. Il a tendance à croire en sa sincérité, Lenne, il suppose aussi qu’elle n’a pas spécialement d’autres choix que de passer par un intermédiaire pour continuer son rôle. Reste que, pourquoi ne considère t-elle pas Lenne parmi tous ces traître, là est la question. Parce que même si, à l’heure actuelle, elle pourrait aisément lui faire confiance, Lenne lui-même n’est pas sûr que ça ne puisse pas changer à l’avenir.
… Mais, dans la majorité des cas, ce ne sont pas des fioles suspectes, et il n’a rien d’autre à faire, Lenne, que de servir de transporteur. Aider, c’est là une autre paire de manches, mais ça, il se le garde bien.
C’est qu’il préfère préciser. Hors de question d’avoir la souffrance - où pire - de quelqu’un sur le dos. Et, s’il pouvait aussi s’éviter d’avoir une réputation étrange aussi, ça l’arrangerait plutôt pas mal.
Tu ajoutes que tu n'as jamais soigné personne, elle s'hésite à un sourire encourageant.
☽ Je pourrais t'apprendre. À repérer les signes, fournir des premiers soins.
Honnêtement tu ne sais pas pourquoi elle fait ça, et en même temps elle a l'air si passionnée.
☽ Je te contacterai à nouveau, mais ne t'inquiète pas rien de tout cela ne te mettra en ... danger.
Elle semble sincère, mais peut-être qu'elle n'a juste pas conscience des risques.
Il a un sourire un peu gêné, Lenne, quand elle dit qu’il n’y aura aucun danger. Il ne sait pas comment c’était dans son ancien village, mais ici, le danger, on le fréquente assez souvent. Il ne lui dit rien, cependant. Après tout, sur ce point-là, il préfère se débrouiller par lui-même plutôt que d’avoir à suivre les avis d’une autre personne.
La réponse étant : environ très régulièrement du côté de l’entrée des employés des Bains - puisqu’elle semble vouloir un minimum de discrétion ; elle ne l’aurait pas traîné un peu à l’écart sinon.
☽ Je te retrouverai ici, ou quelque part dans les Premiers Pas.
Même si les yeux de tout le monde trainaient partout, les Premiers Pas semblaient effectivement un endroit moins dangereux pour ce genre d'échange. Encore que, vous l'apprendrez sûrement vite.
☽ Au fait, moi c'est Indra.
Elle hésite à te tendre la main pour que tu la serre, comme ils le font souvent en haut quand ce n'est pas de grandes embrassades. Elle se ravise, et tapote finalement gentiment sur ton épaule, et fais un pas en arrière, prête à filer dès lors que tu auras donné ton matricule.
(tu pourras demander l'archivage après ta réponse !)
Sans aucune hésitation, Lenne lui donne son matricule en retour, sans rien ajouter de plus. Il se dit qu’il se contentera à l’avenir de zyeuter à droite, à gauche, quand il passera plus tard dans les Premiers Pas, pour voir s’il aperçoit Indra. Est-ce qu’il a grand espoir que ça aboutisse à quelque chose ? Mh, en réalité, espoir n’est pas le mot ; mais pour lui, il voit ça comme n’importe quel autre travail. Une tâche supplémentaire, qui finira pas l’achever aussi à un moment où à un autre. Mais de ça, il ne s’en préoccupe pas. Tout ce qu’il voit, Lenne, ce sont les possibles opportunités. Quoi comme opportunités ? Pour le moment, il ne sait pas.
Il soupire, alors qu’elle part dans la direction opposée à lui. Il relâche ses muscles. Il jette un coup d'œil à sa main. Il n’a pas rêvé. Il remet sa main dans sa poche. Il soupire une nouvelle fois, avant de partir, rentrer chez lui. Il sait, Lenne, qui lui faudra du temps pour comprendre, pour analyser ça ; sans doute que ça va lui embourber l’esprit pendant un moment, sans doute qu’il ne comprendra jamais vraiment tout ? Allez donc savoir…
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